De plus en plus de cœurs brisés font de leur espace numérique le mur des lamentations. Une tendance à double tranchant.
C’est ce que les spécialistes désignent par « la thérapie par la parole », le fait de panser un tant soit peu ses blessures en l’extériorisant. Sur les réseaux sociaux, cette pratique émerge, comme a pu le constater Le Parisien à travers un article récemment consacré à ce sujet en France.
Que ce soit un père dont l’enfant est décédé, un enfant pleurant la disparition d’un parent, ou encore une personne victime d’une douloureuse rupture amoureuse, les internautes ont désormais comme premier réflexe, d’en parler sur Facebook, X, Instagram et autres plateformes numériques.
Aussi surprenant que cela puisse paraître, ces « agoras numériques » offrent le prétexte idéal à ce genre d’initiatives. Pour preuve, ils regorgent de gens censés être des semblables. Ceux-ci devraient donc pouvoir mesurer la portée d’une peine et ce que cela coûte d’en échapper.
La psychologue spécialiste des pratiques numériques Vanessa Lalo prend ainsi, dans les colonnes du Parisien, l’exemple de la mort, « quelque chose d’universel, que l’on connaît tous et sur lequel on a tous de la compassion ».
Une nouvelle forme de solidarité
Ces actes mus par le besoin de partager sa peine suscitent de fait, des élans de solidarité insoupçonnés. L’histoire de Martin raconté par le journal francilien est emblématique de ce phénomène. Par un simple message sur X annonçant le décès de sa mère, cet ingénieur girondin a déclenché une cascade inattendue de réactions bienveillantes.
Avec seulement 500 abonnés, son post a suscité plus de 600 « likes » et une centaine de réponses réconfortantes, dépassant largement son cercle habituel d’interactions. De quoi lui apporter un certain réconfort, le sentiment de s’élever au-delà de la solitude face au drame.
« Je ne m’y attendais pas du tout », s’étonne-t-il, toujours auprès du Parisien, alors que certains pourraient désapprouver une telle démarche. En cause, la nature bien trop souvent anxiogène des réseaux sociaux. D’autant avec le laxisme de certaines plateformes, à l’instar de X sous la propriété d’Elon Musk.
Un phénomène à l’épreuve des dérives
Mais selon Vanessa Lalo, « Internet joue le rôle d’une sorte d’autel virtuel, car quelque chose s’est détaché dans la façon de faire le deuil, et les réseaux sociaux deviennent des journaux intimes dématérialisés ».
Reste que les dérives ne peuvent pas être définitivement écartées, dans un univers où le « paraître » a parfois tendance à prendre le pas sur « l’être ». Autrement dit, cachés derrière leur écran, certains n’ont aucun scrupule à jouer de la compassion des autres pour une raison ou une autre.
Par ailleurs, la bienveillance n’est pas toujours une valeur sur laquelle l’on peut compter sur le web. Comme le fait remarquer si justement Le Parisien, entre véritable soutien mutuel et mise en scène de la souffrance, la frontière reste parfois ténue.
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